La sainteté, un chemin d’imperfections

samedi 2 novembre 2013

Qu’est-ce que la sainteté ? Qu’est-ce que ce mot peut encore évoquer pour nous ?
La définition du Petit Robert est très éclairante : le saint est celui qui « mène une vie irréprochable, en tous points conforme aux lois de la morale et de la religion ». Voilà bien une forme de sainteté parfaite qui paraîtra sans doute inaccessible à la plupart d’entre nous, j’imagine, d’autant plus que nous savons bien que la perfection n’est pas de ce monde, et qu’elle n’a rien à voir avec cette sainteté dont nous parle l’Écriture.

En effet, si nous sommes tous appelés à la sainteté, dans le contexte qui est le nôtre aujourd’hui, ce n’est pas seulement pour correspondre aux modèles reçus, et ainsi réussir sa vie et son salut personnel en vue du bonheur parfait. Non, le chemin de sainteté que nous proposent les Béatitudes n’a que peu à voir avec un quelconque héroïsme de la piété, de l’ascèse ou des vertus. Mais il s’agit, devant la violence du mal, sa puissance, devant l’abîme de détresse qui saisit souvent notre monde, de manifester avant tout que Dieu s’y tient présent car des croyants y demeurent vivants, priants, aimants, comme des combattants du malheur et du destin. Rien de plus, mais rien de moins.

Il y a donc là plus qu’une question de sainteté, un véritable enjeu mystique : faire toujours foi au meilleur de l’humain et montrer que vivre en chrétien, ce n’est pas se tenir dans un état permanent de recherche de perfection. Non, vivre en chrétien, c’est suivre un chemin de vie fait d’ « imperfections », à l’image de celui vécu par le Christ qui ne s’est pas seulement fait homme, mais qui a, lui aussi, connu l’échec et la souffrance, l’épreuve de la trahison de l’amitié, de la mort et de la descente aux enfers, avant de ressusciter le troisième jour.

En relisant ainsi l’Évangile des Béatitudes, dans la foi en la résurrection, mais à la lumière de l’image du Christ en croix, nous comprenons que nous sommes invités à laisser crucifier notre bon sens raisonnable et vertueux, afin de faire nôtre le regard de Dieu : Dieu qui fait de la pierre rejetée des bâtisseurs la pierre d’angle, Dieu qui regarde comme aimable ce qui aux yeux des hommes est sans noblesse, « ignoble ». Voilà le scandale, la folie qui renverse notre échelle des valeurs, c’est-à-dire qui la remet debout pour la sanctifier !


Fr. François-Xavier Ledoux, o.p.
Esprit et Vie n°157

   
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